Prison requise contre le « bienfaiteur » des enfants
Prison requise contre le « bienfaiteur » des enfants
Nelly Terrier | Publié le 20.06.2003
CINQ ANS de prison dont trois
ferme et l'interdiction d'être en contact avec des enfants : les réquisitions du substitut Jouve
contre Charles Fejtö, ancien responsable de l'Aspeca, une association de parrainage d'enfants
en Asie du Sud-Est, dont les deux marraines ont été Charlotte de Turckheim et Juliette Binoche,
se veulent sévères. Pour l'accusation, ce « bienfaiteur », licencié par l'association qui a
porté plainte contre lui, et dont les centres hébergent plusieurs milliers d'enfants au Cambodge,
au Vietnam et aux Philippines, a profité de sa couverture « d'homme parfait » pour assouvir
sa quête de « proies » faciles, des fillettes pauvres qui plaçaient tout leur amour en « papa
Charles ».
Bronzé, sourire aux lèvres
Le tribunal correctionnel de Paris a examiné,
mardi et mercredi, cette affaire d'agression sexuelle sur mineur de 15 ans par personne ayant
autorité. Dans le prétoire, Fejtö, 58 ans, bronzé, sourire aux lèvres. Face à lui, Phearum Sorn,
visage enfantin malgré ses 18 ans, enroulée dans une jupe à la cambodgienne et venue spécialement
de Phnom Penh. La jeune fille raconte à huis clos les faits que la présidente Bartolin répète
ensuite publiquement. Un soir de 1998, Fejtö l'a attirée dans son hôtel, a voulu prendre une
douche avec elle avant de rapprocher les lits jumeaux et de se livrer à de nombreux attouchements.
Ce jour-là, dit-elle, elle est devenue une « vierge mélangée ». Et son fiancé l'a répudiée.
Ce
témoignage est balayé d'un geste de la main par Fejtö. « C'est énorme, cela lui a été soufflé
», nie le prévenu, qui invoque des « contes et légendes de l'Asie où des vieux messieurs endorment
des jeunes filles avec des jus d'orange ». Une défense maladroite, affaiblie par un contexte
sulfureux.
Ainsi, avant Phearum, une première plainte avait déjà été déposée par une autre jeune
femme qui était revenue sur ses accusations et la plainte avait été classée. Pourtant, certains
témoignages lus par la présidente racontent que Fejtö avait des « favorites » parmi les fillettes
des foyers de l'Aspeca et que certaines étaient, « de notoriété publique », ses maîtresses.
D'autres ajoutent qu'il avait l'habitude d'emmener des petites dans sa chambre pour la nuit.
Autre
malaise, enfin. Celui provoqué par le récit des multiples pressions subies par celles qui ont
voulu parler. Au fil des débats, les dénégations de Fejtö, dont l'avocat M
e
Varaut
insiste pour déposer deux cents témoignages en faveur de son client, « homme d'honneur », apparaissent
bien minces. Jugement le 8 juillet.
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