CES INTERMEDIAIRES QUI PROPOSENT DES ENFANTS AFRICAINS SANS VERITABLE RECHERCHE DE FAMILLE SONT BIEN CONNUS ADOPTIONS

21 August 1997

CES INTERMEDIAIRES QUI PROPOSENT DES ENFANTS AFRICAINS SANS VERITABLE RECHERCHE DE FAMILLE SONT BIEN CONNUS ADOPTIONS:ON...

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Par Alain Lallemand et Pierre-Yves Thienpont

Publié le 21/08/1997 à 00:00 Temps de lecture: 5 min

Ces intermédiaires qui proposent des enfants africains sans véritable recherche de famille sont bien connus

Adoptions : on aurait pu sévir il y a plus de deux ans

Bien avant l'échec du dossier d'adoption Gosseries, les partenaires indélicats étaient marqués à la culotte.

Il y a une semaine atterrissait à l'aéroport de Charleroi un père adoptant ayant rendu deux enfants burundais à leur famille biologique après s'être rendu compte que l'adoptabilité des enfants qui lui avaient été confiés n'avait pas été sérieusement vérifiée («Le Soir » du 16 août). M. Guy Gosseries avait alors mis en cause l'association adoptante qui avait participé à ce gâchis - Nicolae et les autres - ainsi qu'un intermédiaire, M. Georges Celis, déjà connu par ailleurs dans des cas d'adoption troubles.

Le cas de l'intermédiaire Georges Celis est assez sérieux pour que nous y revenions aujourd'hui : l'Autorité communautaire pour l'adoption internationale (Acai) confirme avoir porté plainte contre lui à deux reprises auprès du parquet de Liège, et ce pour trois motifs distincts.

Au début de 1997, la plainte était double et portait sur l'entrée illégale de dix enfants zaïrois aux côtés du «padre» Quartemont, mais surtout sur son intervention illégale dans le cas d'une adoption libre (une pratique que l'intéressé nie formellement). La seconde plainte, en mars-avril 1997, porte sur la facturation et la perception de frais d'hébergement pour des enfants qui n'ont jamais été hébergés par ses soins.

Il y a mieux : Mme Françoise Pastor, directrice de l'association adoptante Sourires d'enfants, signale que la fédération des associations adoptantes - dont elle est par ailleurs présidente - avait déjà tiré la sonnette d'alarme il y a deux ans concernant M. Celis et le manque de crédibilité des vérifications d'adoptabilité menées par sa filière. Ce qui n'a pas empêché l'association Nicolae et les autres de continuer à travailler avec lui alors que nombre d'autres avaient pris leurs distances : l'association Emmanuel, Enfants du monde, et même Larisa !

La mesure est comble lorsqu'on apprend, toujours par Mme Pastor, que des enfants (NDLR : de la filière Celis) proposés à l'association Emmanuel et refusés par celle-ci parce qu'elle émettait un doute sur leur adoptabilité ont été refilés à l'association Nicolae et les autres. Obscur ? Cela signifie que, plutôt que d'interrompre une adoption douteuse parce qu'une famille biologique pouvait se manifester, on a préféré fermer les yeux et placer coûte que coûte l'enfant.Lamentable !

Depuis ces histoires, tout est bloqué au Burundi, continue Mme Pastor. Nous avons notamment quatre dossiers pendants, quatre enfants en attente. Comprenez, dans ces conditions, qu'on ne lui dise pas merci. Que quelqu'un commette des erreurs, c'est possible. Mais qu'il les répète, alors là...

GEORGES CELIS S'EXPLIQUE

L'intéressé, lui, ne cille pas. Georges Celis nous affirme maintenant avoir décidé d'arrêter toute activité d'adoption (au net soulagement du secteur), mais se refuse à toute responsabilité, qu'il rejette soit sur le bureau communal des localités burundaises concernées - en ce qui concerne les actes de naissance -, soit sur la famille de l'enfant au sens large, lorsqu'il s'agit de déclarations frauduleuses d'adoptabilité. Si le dossier légal est en ordre, dit M. Celis, je n'ai pas d'autres questions à poser. Je n'ai pas de raison de m'en préoccuper, je dois traiter trop d'enfants.

Georges Celis est visiblement conscient du hiatus existant entre l'«adoption à la burundaise» (une adoption simple, qui suppose la pérennité des contacts entre l'enfant et la famille biologique) et l'adoption plénière de droit belge.

Pour preuve : Légalement, je n'ai pas de nouvelles à transmettre aux parents biologiques. Mais je ne peux quand même pas leur brandir sous les yeux le texte de la loi belge et refuser à ce titre toute information. Alors, officieusement, je leur donne l'information dont je dispose sur le devenir de leurs enfants.

Puisqu'il existe une plainte de l'Acai concernant des frais d'hébergement fantôme, comment expliquer que les parents se soient vu refuser un simple coup d'oeil aux chambres des enfants ? Parce qu'on m'annonçait une inspection venue de Belgique, affirme M. Celis, et que j'ai donné ordre de ne laisser entrer aucun Belge dans les chambres sans accord préalable de l'Etat burundais. Le home n'est pas de droit belge.

Quand on l'accuse d'avoir durablement compromis les relations entre le Burundi et la Belgique en matière d'adoption, il en rejette la responsabilité sur un autre intermédiaire, néerlandophone, travaillant autrefois pour Adoptie zonder grenzen (à laquelle la tutelle flamande a effectivement retiré son agrément) et ayant fait sortir jusqu'à près de 40 enfants d'un seul coup du Burundi.

A l'entendre, il est la victime d'une cabale «politique» : C'est parce qu'ils ne veulent pas de mes négrillons ! La vérité est plus complexe : c'est de son amateurisme que l'Etat - en particulier les Affaires étrangères et la Communauté française - ne veut plus : de ces «dossiers» d'enfants qui font une page manuscrite...

Accordons-lui pourtant ceci : les adoptions d'enfants ayant transité par Georges Celis ont coûté aux parents, en ce qui le concerne, de 80.000 à 120.000 F, tickets d'avion inclus. On ne voit donc pas très bien où il aurait pu dégager un bénéfice. Si l'homme apparaît bien maladroit, la cupidité, elle, ne semble pas faire partie du tableau.

Enfin, si, dans le secteur de l'adoption, on semble considérer que le «cas» Célis était l'un des plus marquants, on remarque cependant que les trafics les plus juteux se produisent dans les filières libres, et sans tapage médiatique cette fois : qui irait se plaindre d'avoir été piégé quand les intermédiaires consultés sont ouvertement illégaux et les parents complices ?

ALAIN LALLEMAND

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