Bébés volés au Guatemala : la maman de Coline réagit

5 February 2020

Bébés volés au Guatemala : la maman de Coline réagit

mer, 05/02/2020 - 07:00 Télépro

Coline Fanon, en 1987 et aujourd'hui

Coline Fanon, en 1987 et aujourd'hui

© RTBF

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Début janvier, en marge de la diffusion d'un «Devoir d'enquête» sur La Une concernant des bébés volés au Guatemala dans les années 1980, nous publiions le témoignage de Coline Fanon, une jeune Belge qui partait sur les traces de ses parents biologiques.

Colette Blerot, sa maman adoptive, a tenu à apporter quelques précisions.

Voici le courrier qu'elle nous transmet :

Je suis la maman adoptive de Coline. Loin de moi l’envie de polémiquer, seules deux choses motivent ce «droit de réponse». La première est que, comme disait Camus, «Mal nommer les choses ajoute au malheur du monde». La deuxième est qu’il m’importe que les lecteurs reçoivent une information correcte à ce sujet sans risque d’amalgames.

Je souhaite simplement dissiper l’ambiguïté que je perçois dans cet article et ce d’emblée en son titre. En effet, dans la même phrase («Adoptée par un couple belge dans les années 1980, Coline a été volée à sa famille au Guatemala»), il est question d’une famille qui adopte un enfant et du vol de cette enfant, sans précision aucune sur les auteurs présumés de ce rapt. Ce qui peut laisser sous-entendre que la famille belge pourrait être associée de près ou de loin au trafic d’enfants et donne une impression tronquée de ce qui s’est passé, du rôle et de la position de chacun dans cette affaire.

C’est d’autant plus dommageable que nulle part dans l’article, il n’est précisé que les parents adoptifs ont été attentifs à procéder à une adoption légale, dans le plus grand respect des parents biologiques et dans l’intérêt de l’enfant.

On retrouve la même ambiguïté dans l’article quand il est question d’Ofelia de Gama («Elle a été le témoin de la maman biologique pour l'acte d'abandon - nécessairement faux -, puis elle a reçu les parents belges de Coline pour leur remettre la petite fille.»). De nouveau, cette dernière phrase associe les parents belges à la filière frauduleuse. De fait, nous avons rencontré Ofelia de Gama, mais sans rien savoir de ce qui se tramait dans l’ombre, ni des faux documents que nous prenions comme officiels et qui ont d’ailleurs été considérés comme tels par la juridiction belge lors de la légalisation de l’adoption.

Pour terminer, je souhaiterais vous dire comment j’ai vécu ces événements. Quand en 2017, nous avons découvert l’existence du trafic de bébés guatémaltèques dont notre fille a été victime, le sol s’est dérobé sous mes pas, un mélange de tristesse et de colère m’a envahie. Comment était-ce possible d’avoir été trompés ainsi, malgré toutes les précautions prises (respect de la procédure légale d’adoption, choix d’une association d’adoption recommandée par les autorités belges compétentes en la matière) ? C’était donc confiants que nous avions entamés les démarches pour accueillir un enfant du Guatemala.

Imaginer le désarroi tant des parents biologiques que de Coline d’être séparés de la sorte. En tant que parents, c’est terrible de se sentir mêlés malgré soi à ce drame, alors que nous n’avons jamais rien caché à notre fille de son adoption et l’avons toujours assurée de notre soutien inconditionnel si elle souhaitait rechercher sa famille d’origine.

Alors, on se bat, on se remémore tout ce qui s’est passé 30 ans plus tôt, les faits, les contacts dans les moindres détails. Nous décortiquons tout avec Coline qui mène sa recherche sans rien laisser tomber.

Seule la vérité compte. Ce qui compte également pour moi, c’est que Coline puisse se réapproprier son histoire, qu’elle puisse «vivre avec» le fait que ce rapt dont elle a été victime a fait de sa vie tout autre chose que ce qu’il devait normalement advenir et trouver un équilibre entre ses deux familles.

Et en tant que maman victime de cette tromperie, il est aussi nécessaire de prendre soin de moi, de veiller à ne pas endosser un sentiment de culpabilité qui ne serait pas juste. Pas juste, parce que nous avions fait tout ce qui était en notre pouvoir pour que cette adoption se fasse en toute légalité et dans le respect des différentes personnes concernées.

C’est aussi pour cette raison que je me bats pour qu’aucune information tronquée ne circule à propos de notre histoire.

Colette Blerot

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