Haïti & France. Ces adoptions sont "précipitées et éthiquement condamnables", selon Pierre Lévy-Soussan, pédopsychiatre

21 December 2010

Haïti & France. Ces adoptions sont "précipitées et éthiquement condamnables", selon Pierre Lévy-Soussan, pédopsychiatre

Pierre Levy-Soussan.jpgAlors que 300 enfants haïtiens en cours d’adoption sont attendus à Paris d’ici à vendredi, Pierre Lévy-Soussan, pédopsychiatre et psychanalyste, était l’invité de France Info ce matin.
Lui s’inquiète de l’accélération du processus d’adoption de ces enfants. "Attention à ne pas confondre temps de l’adoption et urgence humanitaire, prévient-il. Il faut du temps pour construire une famille".

L’opération menée depuis hier par le Quai d’Orsay est pour Pierre Lévy-Soussan, " précipité et condamnable au regard d’une certaine éthique de l’adoption".

Pour le pédopsychiatre, "toute accélération du processus juridique est préjudiciable aux enfants". Il estime à l’inverse des parents que Bernard Kouchner a eu raison de prendre le temps nécessaire à l’examen des dossiers. Il a mis en place "une logique adoptive et non une logique humanitaire", justifie-t-il, avant d’expliquer : "l’adoption n’est pas faite pour sauver des vies mais pour construire des familles".

Le spécialiste de l’adoption rappelle en outre que Haïti fait partie des pays qui n’ont pas signé la convention de la Haye et que ces enfants sont donc à haut risque de trafic d’enfants, ce qu’on appelle le blanchiment, c’est-à-dire rendre adoptable des enfants qui ne le sont pas en payant des familles.

Pierre Lévy-Soussan rappelle en outre que, dans le cas présent, il s’agit d’adoptions simples, c’est-à-dire d’adoption alors que les parents sont connus et que les enfants ont des liens avec eux. Dans ce cas précis, "accélérer la procédure met en péril la qualité de la séparation et l’équilibre psychique de l’enfant".

Enfin, le spécialiste, devant les images d’embrassades, prévient qu’il faut pour les parents " respecter le temps de l’enfant, ne pas se précipiter sur lui". Dans l’idéal, il eut fallu que les familles passent du temps avec l’enfant sur place, avant de le ramener. Au Brésil, les parents adoptifs sont tenus de passer trois mois, au Vietnam aussi. Ici, ils auront passé quelques heures.